Pierre Rabhi

Biographie

Paysan, écrivain et penseur français d'origine algérienne, Pierre Rabhi a été l’un des pionniers de l’agriculture écologique en France.

            Déchiré, dans son enfance algérienne, entre une origine musulmane et une éducation à l'occidentale, il fut le témoin de ces populations écartelées entre leurs traditions séculaires et la modernité. Petit employé de banque, puis ouvrier, travailleur immigré confronté au racisme et à l'absurdité de l'univers urbain, il a très tôt quitté ces milieux étouffants et voulu expérimenter d’autres façons de vivre, libre, en accord avec la nature. Il parvint, en compagnie de sa femme, et de sa famille à vivre des ressources d’une petite ferme en Ardèche, réalisant ainsi son rêve de retour à la terre. Fort de cette réussite, il chercha dès lors à transmettre son savoir-faire agronomique et lança en France, en Afrique sahélienne et au Maghreb, de nombreuses initiatives pour contribuer à l’autonomie, la sécurité et la salubrité alimentaires des populations. Ainsi, pendant près de soixante ans, il a soutenu le développement de l’agroécologie à travers le monde. Il s'est consacré, à partir des années 1980, à l'écriture, et a donné des centaines de conférences en France, en Europe et au Maghreb notamment. 

            Pierre Rabhi a été à l’origine de nombreuses structures, nées de sa propre initiative ou de ses idées : ainsi l’association Terre & Humanisme, le centre agroécologique Les Amanins et le Mouvement Colibris ou encore le Fonds de Dotation Pierre Rabhi. Sollicité pour de très nombreuses conférences, il a publié une trentaine d’ouvrages dont chez Actes Sud “Vers la sobriété heureuse”,  «Pierre Rabhi, semeur d’espoirs – entretien avec Olivier Le Naire » mais aussi « L’agroécologie, une éthique de vie »,  « La Puissance de la modération » aux Editions Hozhoni, et « La Convergence des Consciences » aux Editions du Passeur. Ses derniers ouvrages sont, dans la collection « Carnets d’Alerte » en collaboration avec Juliette Duquesne « Pour en finir avec la faim dans le monde », « Les semences, un patrimoine vital en voie de disparition », « Les dérives de la finance ou l’art de la prédation légalisée » « L’eau que nous sommes » (Presses du Châtelet). A l’automne 2017 sont sortis deux albums jeunesse « Demain entre tes mains » avec Cyril Dion (Actes Sud Junior) et « Pierre l’enfant du désert » avec Claire Eggermont, illustré par Marc N’Guessan (Plume de Carotte). Juste avant son décès sont sortis deux ouvrages "La Tristesse de Gaïa" et une réédition de "Vers la Sobriété heureuse" avec une préface de Matthieu Ricard, tous deux chez Actes Sud. 

La biographie complète (ou presque !!) : en vidéo par ici : https://www.youtube.com/watch?v=HJFXtH-1zL4&t=28s

1938 : naissance à Kenadsa en Algérie, aux portes du Sahara.

1942 : orphelin de mère, Pierre Rabhi est confié par son père à un couple de Français pour être éduqué, sans rompre avec son milieu traditionnel. Il ira à l’école coranique et à l’école française. Ses études restent élémentaires, couronnées par un simple certificat d’études.

1952 : sa famille d’adoption déménage à Oran, située à 750 km de Kenadsa. Les liens avec la famille naturelle s’estompent. Pierre Rabhi se convertit au christianisme 4 ans plus tard, ce qui l’exclut de sa communauté musulmane.

1958 : en pleine guerre d’Algérie, suite à une dissension avec son père adoptif, Pierre Rabhi est renvoyé de chez lui. Il s’installe provisoirement dans un petit appartement à Oran, il est alors employé de banque.

1959 : départ pour la France, arrivée à Paris. Pierre Rabhi trouve un emploi d’ouvrier spécialisé dans une entreprise de fabrication de machines agricoles de la région parisienne. Il découvre le quotidien d’une société tout entière au cœur des Trente Glorieuses. Sa lecture des philosophes l’amène à entamer une réflexion de fond sur la condition humaine dans ce contexte, condition humaine qu’il vit personnellement comme une aliénation.

1960 : rencontre avec Michèle qui deviendra son épouse. Ils décident ensemble de quitter la ville pour la campagne. Sur les conseils d’un ami, Pierre Rabhi écrit plusieurs lettres à l’attention de personnes vivant à la campagne, susceptibles de pouvoir les accueillir et les aider dans leur phase de transition.

1961 : Ils reçoivent une réponse favorable d’un médecin de campagne en Ardèche. Ils décident de s’installer provisoirement à proximité du docteur. Après un mariage civil à Paris, le couple se marie dans la petite église romane de Thines près des Vans. Pierre Rabhi s’inscrit dans une maison familiale rurale pour y apprendre les bases de l’agriculture, et obtient son brevet d’apprentissage agricole. 

1962 : Tout en travaillant comme ouvrier agricole, Pierre Rabhi recherche activement une ferme à acheter.

1963 : En ces temps d’exode rural, les fermes disponibles sont nombreuses. Le couple découvre la ferme de Montchamp, proche de Lablachère. Le lieu est dépourvu d’électricité et d’eau courante, la maison est à restaurer entièrement et la terre est pauvre. Les banquiers refusent d’avancer les fonds pour ce qu’ils prévoient être un échec. Ce n’est que grâce à l’appui du président de la maison familiale rurale dans laquelle Pierre Rabhi a fait son apprentissage qu’ils peuvent obtenir le crédit nécessaire pour l’achat.

1971 : L’adduction d’eau arrive enfin. Après avoir planté des vergers, amorcé la restauration du bâtiment, et entamé un micro-jardinage, la famille Rabhi constitue un troupeau de chèvres qui sera, quelques années plus tard, la base de l'économie familiale, complétée par des activités artisanales. 

1973 : les stagiaires de tous âges et catégories sociales qui se succèdent à la ferme sollicitent Pierre Rabhi afin d’organiser des petites sessions d’initiation.

1975 : Les conditions de vie à la ferme s’améliorent avec l’installation de l’électricité. Pierre Rabhi commence à faire parler de lui au plan local, notamment avec ses causeries, qui suscitent de plus en plus d’intérêt, et les résultats obtenus avec Michèle au sein de la ferme familiale.

1980 : le directeur du Centre des relations internationales entre agriculteurs pour le développement (CRIAD) l’invite à présenter son travail. Il intègre alors cette organisation dédiée à l’entraide et la solidarité entre les paysans du monde entier.

1981 : départ pour le Burkina Faso avec des agriculteurs du CRIAD en qualité de « paysan sans frontière » afin de rencontrer les jeunes agriculteurs locaux. Il visite les institutions paysannes (coopératives, villages…), et est amené à parler aux cadres de l’administration des centres de formation et aux communautés paysannes.

1982 : Pierre Rabhi est désigné comme formateur au sein de six établissements chargés de former les jeunes agriculteurs au Burkina Faso.

1983 : rédaction de son premier livre Du Sahara aux Cévennes, récit autobiographique qui reçoit le Cabri d’or (prix cévenol de littérature). Les hivers se succèderont et le ramèneront au Burkina Faso pour dispenser ses formations et poursuivre les programmes auprès des paysans.

1984 : rencontre avec Maurice Freund, créateur d’une compagnie aérienne atypique desservant des pays africains enclavés sous une forme associative coopérative. C’est ainsi que naît, à partir d’un projet de campement hôtelier, un centre de formation à l’agroécologie situé à Gorom-Gorom au nord du Burkina Faso. Devant le succès de l’opération, le président Thomas Sankara proposera de faire de l’agroécologie une option nationale, mais son assassinat peu de temps après mettra fin à ce programme.

1988 : avec le conseil général de l’Herault et l’appui d’Edgar Pisani, ancien ministre de l’Agriculture, Pierre Rabhi et Patrice Burger (rencontré à Gorom-Gorom) créent le Carrefour international d’échanges de pratiques appliquées au développement (CIEPAD). Cette structure valorise les ressources locales, forme des agriculteurs et met en œuvre des programmes internationaux pour développer l’agroécologie. Le CIEPAD sera dissous en 1998, mais une partie de son activité continue au sein du CARI sur le même lieu.

1989 : publication de L’Offrande au crépuscule, qui relate l’expérience au Burkina Faso, livre primé par le ministère de l’Agriculture dans la catégorie Sciences sociales.

1993 : suite aux accords d’Oslo, Pierre Rabhi intervient dans le village palestinien de Falamieh afin d’y lancer un programme de développement de l’agroécologie. 

1994 : création de l’association Les Amis de Pierre Rabhi (qui devient Terre & Humanisme en 1999), chargée de développer les pratiques agroécologiques. Elle est aujourd’hui très active sur le plan local comme au plan international. Cette année marque le début d’une collaboration avec la Tunisie par la participation à un Symposium sur les Oasis en tant que patrimoine mondial (organisé par l’Unesco). De cet événement naîtra un développement des pratiques agroécologiques dans le pays, et notamment dans l’oasis de Chenini Gabès dans le cadre du programme de réhabilitation sous l’égide de l’Unesco.

1996 : Création du concept des Oasis en Tous Lieux et rédaction du manifeste éponyme. Pierre Rabhi est de plus en plus sollicité pour donner des conférences, son implication publique s’intensifie.

1997 : l’ONU reconnaît Pierre Rabhi en tant qu’expert en sécurité et salubrité alimentaires et lui demande d’élaborer une convention de lutte contre la désertification. Il est alors chargé de formuler des propositions concrètes pour son application.

2001 : rencontre avec Michel Valentin, industriel et homme d’affaires atypique. Le dialogue aboutit à une collaboration qui donnera naissance au centre des Amanins (Drôme), lieu agricole dédié à l’accueil du public et à la formation, qui s’élargira à la création d’une école du Colibri. 

2002 : Pierre Rabhi est sollicité par ses amis pour présenter sa candidature aux élections présidentielles. C’est pour lui une opportunité de proposer sa vision au plan national. Il donnera une quarantaine de conférences qui imprimeront une réflexion globale sur des thématiques telles que la décroissance, la production et la consommation locale, la place du féminin au cœur du changement. 

2003 : création du Mouvement « appel pour une insurrection des consciences » (Mapic) à la suite de la campagne électorale.

2005 : création de l’association Terre & Humanisme Maroc dont l’objectif est d’améliorer les conditions de vie de l’être humain dans son environnement naturel. En plus de nombreuses actions de terrain près de Casablanca, elle créée un centre de formation à l'agroécologie près de Marrakech. 

2008 : lancement du Mouvement pour la Terre & l’Humanisme, initialement chargé de communiquer largement sur les valeurs exprimées par Pierre Rabhi et de mettre en place un véritable changement social et humain. L’association deviendra deux années plus tard l’ONG Colibris, en référence à la légende du colibri citée par Pierre Rabhi lors de ses conférences.

2010 : création de la Fondation Pierre Rabhi pour la sécurité, la salubrité et l’autonomie alimentaires des populations, sous l’égide de la Fondation de France. Elle sera remplacée par le Fonds de Dotation Pierre Rabhi. 

2013 : création du Fond de Dotation Pierre Rabhi dont la vocation est, outre de participer à propager les idées développées par Pierre Rabhi, de promouvoir et développer l’agroécologie. S’il soutient financièrement des projets, il peut aussi apporter une assistance opérationnelle. 2013 est aussi l’année de la sortie au cinéma du long métrage documentaire Pierre Rabhi : Au nom de la terre, réalisé par Marie-Dominique Dhelsing.

2017 : Pierre Rabhi se voit attribuer l’insigne de Chevalier dans l’Ordre national de la Légion d’Honneur, qui vient récompenser son parcours humaniste consacré au développement de l’agroécologie et à la diffusion d’une éthique de vie prônant la « sobriété heureuse ». Cette dernière décennie aura été marquée par la propagation de plus en plus large de son parcours et de ses idées, touchant notamment le grand public et les médias nationaux.   

2021 : le 4 décembre, décès de Pierre Rabhi, des suites d'une hémorragie cérébrale.